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Mon prof est vampirologue

De Nosferatu à Twilight, chaque génération a son vampire, croit Peter Golz, expert renommé en histoire culturelle des vampires.

Peter Golz, vampirologue, dans son bureau de l'Université de Victoria.

Le vampirologue Peter Golz sait que son métier provoque des sourires. Pourtant, la démarche académique demeure très sérieuse, affirme-t-il .

Photo : Radio-Canada / Philip McLachlan

« Êtes-vous un vampire? »

La question amuse Peter Golz. Derrière son bureau, au milieu de bibliothèques si imposantes qu’elles semblent vouloir l’engloutir, apparaît un sourire espiègle.

Partout autour du professeur s’empilent les Nosferatu, Dracula, Pandora (dédicacé par l’illustre écrivaine Anne Rice) et même des œuvres, moins célèbres, comme Vampires émotionnels au travail : faire face aux patrons et aux collègues qui tirent tout votre jus.

Normal d’avoir une collection aussi volumineuse lorsqu’on traite de vampires, puisqu’aucun monstre n’a aussi souvent été réinventé dans notre culture.

C’est ce qu’il enseigne à l’Université de Victoria, sur l’île de Vancouver, dans son cours intitulé L’histoire culturelle des vampires dans la littérature et le cinéma, qui fête aujourd’hui ses 20 ans d'existence. Ils m’ont forcé à ajouter le mot littérature dans le titre du cours, parce que le sujet n’était pas pris au sérieux à l’époque, se plaît-il à raconter.

Vampirologue avoué, il propose pour la première fois de créer le cours en 1992. Il a essuyé de nombreux refus avant de recevoir enfin le feu vert, en 2001.

Depuis, Peter Golz est connu à travers le monde comme étant une sommité en matière de vampires, comme en témoigne sa carte de membre de l’exclusive Société transylvanienne de Dracula.

Peter Golz, vampirologue, dans son bureau de l'Université de Victoria.

Selon Peter Golz, les gens sont fascinés par les êtres fantastiques, comme le montre l'engouement pour les films de Marvel.

Photo : Radio-Canada / Philip McLachlan

À chaque génération son vampire

C’est en voyant le Bal des Vampires, aussi appelé Pardonnez-moi, mais vos dents sont dans mon cou, que Peter Golz vit son premier amour avec la créature ténébreuse. Le film de Roman Polanski, mettant en vedette Sharon Tate, qui sera assassinée quelques années plus tard par Charles Manson, est son premier contact visuel avec le vampirisme. 

Aujourd’hui propriétaire de plus de 500 films de vampires, le professeur analyse dans son cours la présence de vampires depuis le film muet allemand Nosferatu, sorti en 1922, jusqu’à la nouvelle comédie américaine What We Do in the Shadows. J’adore le fait qu’ils soient si différents à travers le temps.

Il n’existe pas de figure mythologique qui se compare aux vampires en termes de fréquence et d’impact.

Une citation de Peter Golz, vampirologue
Des livres appartenant à Peter Golz, vampirologue, dans son bureau de l'Université de Victoria.

Peter Golz a des centaines de livres et d'encyclopédies portant sur Dracula et d'autres vampires.

Photo : Radio-Canada / Philip McLachlan

Bram Stoker publie Dracula en 1897. Le roman est le premier d'une longue série d'adaptations qui mettent en scène le comte sanguinaire.

Initialement, Dracula est l’Autre avec un grand A. Il vient d’Europe de l’Est, il est perçu comme une menace, d’autant plus qu’on le croit dangereux auprès des femmes, souligne Peter Golz.

Nosferatu apparaît à l'écran dans la foulée de la grippe espagnole, une pandémie qui a fait 50 millions de morts selon certaines estimations. Son vampire ressemble à un animal qui répand la souffrance .

Bien plus tard, la période qui voit la publication d’Entretien avec un vampire présente un être tourmenté, un être qui souffre, avec qui l'on peut sympathiser. C’est un virage complet par rapport au monstre qui tue sans discrimination .

L’une des caractéristiques qui les unissent est bien sûr leur insatiable soif de sang. Avec les vampires, on est dans la gratification instantanée. Le principe de vivre pour le plaisir.

Un principe qui échappe quelque peu à la plus récente sensation Twilight, remarque Peter Golz. La tension sexuelle est présente, mais elle ne se concrétise qu’à la toute fin, et la grossesse qui en résulte est brutale, on dirait un châtiment.

Peter Golz, vampirologue, dans son bureau de l'Université de Victoria.

Peter Golz ne porte pas de cape dans la vie de tous les jours. Ici, il montre un souvenir de la comédie musicale « Bal des Vampires, ou Pardonnez-moi, mais vos dents sont dans mon cou » qu'on lui a offert.

Photo : Radio-Canada / Philip McLachlan

Un monstre qui excite les passions

Pourquoi Twilight a-t-il donc autant marqué une génération?

Bien, je pense que c’est l'attrait sexuel de Robert Pattinson , dit Peter Golz au sujet de l'interprète d’Edward. Au cinéma, on entendait les soupirs des jeunes filles et de leur mère lorsque le vampire scintillant apparaissait à l’écran.

Cela me rappelle Béla Lugosi. Quand son Dracula est sorti en 1931, le slogan disait : ''Une infirmière sera présente dans la salle'', en voulant dire que les gens pouvaient perdre connaissance.

Le vampire, c’est ce personnage attirant à qui personne ne peut résister. C'est la tentation, le leurre.

Une citation de Peter Golz, vampirologue
Scène du film Entretien avec un vampire (1994).

Le film « Entretien avec un vampire » (1994) avec Tom Cruise, Brad Pitt et Antonio Banderas, est le film préféré des étudiants, dit Peter Golz. « Peu de films font autant consensus. C'est une bonne histoire. Puis, le choix des acteurs y est peut-être pour quelque chose », dit-il en riant.

Photo : Warner Bros

Des représentations homoérotiques

Les relations sexuelles entre les femmes dans le monde des vampires sont fréquentes, mais Dracula n’échappe pas non plus à l'homoérotisme. Les vampires sont en quelque sorte androgynes et non binaires, en ce sens qu’ils désirent les hommes et les femmes.

La première victime du roman Dracula est Jonathan Harker, rappelle Peter Golz. Alors qu’il est attaqué par ses trois maîtresses, Dracula surgit et dit la célèbre phrase : "Cet homme m’appartient!" Stoker en était à tout le moins inconscient.

Entretien avec un vampire a été un tournant homoérotique du grand cinéma, même si les acteurs Brad Pitt et Antonio Banderas ne se sont jamais embrassés, comme ils devaient le faire au départ.

Le vampirologue Peter Golz dans les couloirs de l'UVic.

Quelles seront les caractéristiques du prochain vampire? « C’est la beauté de la chose, on ne sait tout simplement pas », dit Peter Golz.

Photo : Radio-Canada / Philip McLachlan

Un sujet qui fait sourire, mais des études prises au sérieux

Peter Golz paraît réservé, mais l’intensité de son regard exprime sans conteste sa passion pour cette créature tantôt monstrueuse, tantôt séductrice.

Au cours des 20 dernières années, il a pu faire partager cet engouement à des milliers d’étudiants. C’est le cours facultatif le plus populaire, dit-il, non sans fierté.

Pendant la pandémie, alors que les cours étaient en ligne, des étudiants de partout, d’Asie, d’Europe ont assisté à mon cours, parfois au petit matin, s’étonne-t-il.

Cette année, 150 étudiants s’entassent entre les murs de l’Université pour discuter de vampirisme avec lui. Certains étudiants se démarquent visuellement, admet-il, en référence à une apparence plutôt gothique. Une étudiante était si impressionnée par Nosferatu qu’elle se l’est tatoué sur le bras.

Il arrive que ses étudiants lui demandent s’il est un vampire. Non, leur répond-il. 

Mais comment en être certain? Comme l’écrivait Bram Stoker dans Dracula : La puissance du vampire tient à ce que personne ne croit à son existence.

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