Tout comme la Lune s’éloigne chaque année de notre planète au rythme de 3,8 cm par an, la plupart des lunes du Système solaire en font de même sous l’action des bourrelets de marées qu’elles lèvent sur leur propre planète. Une partie du mouvement de rotation de la planète est alors transférée vers l’orbite de la lune, repoussant celle-ci peu à peu vers l’extérieur.
C’est en utilisant les données de la sonde Cassini de la NASA que les chercheurs sont arrivés à déduire, pour Titan, une expansion orbitale d’environ 11 cm par an, soit cent fois plus vite qu’attendu par l’observation d’autres lunes de Saturne.
Pour ce faire, les chercheurs ont travaillé sur deux types d’observations. Un premier groupe, dirigé par un chercheur de l’Observatoire de Paris – PSL, au sein de l’Institut de mécanique céleste et de calcul des éphémérides (IMCCE / Observatoire de Paris / CNRS / Sorbonne Université / Université de Lille) en détachement au JPL (NASA, Californie), a utilisé un vaste ensemble d’observations de Titan, collectées sur une période comprise entre 1886 et 2017, jusqu’aux dernières images obtenues par la sonde Cassini.
Un second groupe, mené par l’Université de Bologne, a concentré ses efforts sur les données recueillies lors d’une dizaine de survols rapprochés de Titan par la sonde Cassini. Dans ce dernier cas, il a été possible de déduire la position exacte de Titan dans l’espace, avec quelques centaines de mètres de précision.
En comparant leurs mesures, les deux groupes sont arrivés à un résultat identique et très surprenant : Titan s’éloigne de Saturne beaucoup trop rapidement. Un résultat inattendu ? Enfin presque… Car en 2016, Jim Fuller, astrophysicien au Caltech (Californie), avait prédit une telle accélération, comme conséquence du refroidissement interne de Saturne.
A la différence du système Terre-Lune, Saturne est essentiellement une grosse boule de gaz. La physique qui régit son intérieur est donc très différente de celle des corps rocheux.
En confirmant la théorie de Fuller et coauteurs, les chercheurs ouvrent un nouveau champ d’investigation pour l’âge et la formation du système saturnien. Leurs travaux impliquent aussi un réexamen de nombreux objets astrophysiques, allant des lunes de Jupiter aux systèmes d’étoiles multiples, sans oublier les nombreuses exoplanètes gazeuses qui évoluent autour d’autres étoiles que le Soleil.
Référence
Ce travail de recherche a fait l’objet d’un article intitulé « Resonance locking in giant planets indicated by the rapid orbital expansion of Titan » par Valéry Lainey et.al. paru le 8 juin 2020 dans la revue Nature Astronomy.
Dernière modification le 12 janvier 2022